La Gendarmerie dans la guerre d’Indochine

  • Par M. Ludovic Dubois, Délégation au patrimoine de la gendarmerie
  • Publié le 11 mai 2024
Gendarmes en poste en Indochine avec des troupes auxiliaires autochtones.

Gendarmes en poste en Indochine avec des troupes auxiliaires autochtones.   

© Société nationale de l’histoire et du patrimoine de la Gendarmerie - SNHPG

Il y a 70 ans, la bataille de Diên Biên Phu sonnait le glas de la domination française en Indochine, après plus de sept ans de combats. Les opérations militaires n’épargnèrent pas les nombreux gendarmes appelés à servir au sein des unités spécialement créées tout au long de la guerre d’Indochine (1946-1954). Cet article propose de revenir sur l’implantation historique de la Gendarmerie et sur son action au cours de ce conflit.

Les premiers gendarmes français arrivent sur le territoire indochinois (qui correspond aujourd’hui au Vietnam, au Laos, au Cambodge et à une partie de la Chine) en 1861, avant la création officielle d’une compagnie de gendarmerie en 1870. Ces premiers gendarmes sont peu nombreux mais peuvent s’appuyer sur des auxiliaires pour mieux connaître et contrôler ce territoire. Le corps des auxiliaires, créé en 1903, regroupe des Indochinois qui assistent les gendarmes dans plusieurs de leurs missions, en servant notamment d’interprètes auprès des populations.

Gendarmes en poste en Indochine avec des troupes auxiliaires autochtones.

Gendarmes en poste en Indochine avec des troupes auxiliaires autochtones.   

© Société nationale de l’histoire et du patrimoine de la Gendarmerie - SNHPG

L’histoire de la Gendarmerie en Indochine est par la suite marquée par la Seconde Guerre mondiale et par la présence des troupes japonaises dès 1940. Dans les derniers mois de la guerre, les gendarmes et l’administration coloniale française sont victimes d’un véritable « coup de force » des Japonais, qui exécutent une partie des forces françaises présentes en Indochine. Certains gendarmes échappent à cet épisode sanglant et organisent la résistance, en menant parfois des opérations de guérilla contre l’occupant. C’est notamment le cas du capitaine d’Hers, qui est tué lors d’un combat contre les troupes nippones, le 18 mars 1945. Cet officier de gendarmerie s’est illustré tout au long de l’occupation japonaise, par la transmission de renseignements aux Britanniques. Il est fait compagnon de la Libération à titre posthume en 1946.

Portrait du capitaine Jean d’Hers, compagnon de la Libération à titre posthume.

Portrait du capitaine Jean d’Hers, compagnon de la Libération à titre posthume.

© Ordre de la Libération - Musée de l’ordre de la Libération

Si la Seconde Guerre mondiale prend fin, les tensions entre les indépendantistes et l’administration française s’intensifient. Dès la fin de l’année 1945, le général Leclerc est envoyé sur place avec une partie de la 2e Division Blindée et quelques gendarmes prévôtaux. Cependant, la situation locale s’envenime et les tentatives de négociations échouent : la guerre d’Indochine débute officiellement en décembre 1946.

La participation de la Gendarmerie à la guerre d’Indochine

À la fin de l’année 1946, il est décidé de créer et d’envoyer en Indochine des unités de gendarmerie regroupées sous le nom de Légion de garde républicaine de marche (LGRM). Trois LGRM, mises sur pied en amalgamant des Gendarmes départementaux (G.D.) et des gardes républicains (la proportion est estimée à 4/5 de G.D. et 1/5 de gardes), arrivent sur ce territoire entre janvier et avril 1947. À ceux-ci s’ajoutent des éléments de la gendarmerie maritime et de la gendarmerie de l’Air, tandis qu’une inspection de gendarmerie est spécialement créée pour ce territoire.

Un gendarme donne des instructions sur un mortier de 81 mm au fort de Laï Chau, en 1953.

Un gendarme donne des instructions sur un mortier de 81 mm au fort de Laï Chau, en 1953.

© Jean Péraud/ECPAD/Défense

Les trois LGRM ont pour mission principale d’encadrer et de former des éléments militaires comme la Garde civile cochinchinoise ou la gendarmerie laotienne. Les gendarmes sont également appelés à mener des opérations de prévôté, à encadrer des partisans (chargés de protéger les plantations), tout en organisant la garde des prisonniers internés militaires. En plus de ces missions, les militaires de la gendarmerie servent dans des postes isolés ou au sein d’unités fluviales.

Qui sont les gendarmes servant en Indochine ?

Les gendarmes mobilisés en Indochine sont dans un premier temps principalement prélevés sur les unités servant en Allemagne, en Autriche ou en Afrique du Nord, avant que l’envoi de gendarmes depuis la métropole ne soit rendu nécessaire par l’évolution du conflit. Les LGRM sont réparties sur l’ensemble de l’Indochine, et l’Inspection locale s’assure que les gendarmes sont relevés et remplacés. En moyenne, ils y sont affectés pour une durée de 24 mois. Pour une partie du personnel, il s’agit de jeunes hommes entrés dans la gendarmerie au cours de l’Occupation pour échapper au STO (Service du Travail Obligatoire), ou bien sortant d’école de gendarmerie. Il s’agit parfois de leur première affectation. Afin d’organiser les relèves tout au long du conflit, des « tours au départ » se mettent en place en métropole. Ceux-ci prennent la forme de listes désignant les hommes appelés à servir en Indochine. Seules certaines catégories de personnels peuvent être exemptées de service en Extrême-Orient (pères de famille nombreuse, anciens prisonniers ou déportés…).

Sur place, les conditions de vie des gendarmes sont assez différentes de celles qu’ils ont pu connaître en métropole. En effet, une grande partie laisse leur famille derrière eux. De plus, les postes isolés représentent des défis que les gendarmes doivent relever : la taille du territoire à contrôler empêche un maillage aussi important et efficace qu’en métropole. Du fait de cette situation, certains sous-officiers obtiennent des postes à responsabilités : un garde peut être nommé chef de section et commander entre 50 et 100 hommes.
Au sein de ces postes isolés, les gendarmes sont au contact des troupes du Viêt Minh, tout en effectuant des missions de reconnaissance et d’escortes de convois. Ils effectuent ainsi des missions identiques à celles des autres militaires français et servent même dans des unités combattantes.

L’Indochine : l’engagement des gendarmes reconnu par une inscription au drapeau

Entre 1946 et 1956, près de 14 000 gendarmes ont servi en Indochine, pour maintenir un effectif permanent sur place d’environ 3 000 hommes. On dénombre 680 morts et plus de 1 500 blessés pour la gendarmerie au cours du conflit (Benoît Haberbusch, « Les gendarmes dans les guerres de décolonisation », dans Jean-Noël Luc (dir.), « Histoire des gendarmes, de la maréchaussée à nos jours », Paris, Nouveau monde poche, 2016, p.157, NDLR). Par décision ministérielle du 12 septembre 1956, la garde républicaine et la gendarmerie obtiennent que la mention « Indochine 1945-1954 » soit inscrite au drapeau en reconnaissance des services accomplis au cours du premier conflit de décolonisation que connaît la France. Par ailleurs, certains gendarmes décédés en Indochine ont donné leur nom à des promotions d’écoles de gendarmerie, tandis que la promotion 2004-2005 de l’EOGN, baptisée « Ceux d’Indochine », célèbre, de manière collective, la mémoire des soldats de la loi qui ont servi sur ce théâtre d’opérations.

En plus des missions variées que les gendarmes ont dû accomplir en Indochine, certains d’entre eux se sont illustrés au cours de combats meurtriers, comme à Diên Biên Phu.

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